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Le député Marius Konan (PDCI) désavoue Alassane Ouattara: «L’ordonnance prise pour modifier le code électoral n’a pas de fondement juridique…»

Le député Marius Konan (PDCI) désavoue Alassane Ouattara: «L’ordonnance prise pour modifier le code électoral n’a pas de fondement juridique…»

 

Le chef de l’Etat, Alassane Ouattara, a pris une ordonnance pour modifier le code électoral. Dans cette contribution publiée sur sa page facebook, le député Marius Konan, membre du groupe parlementaire PDCI-RDA, démontre comment ces lois prises par ordonnances n’ont pas de fondement juridique et propose des solutions en tenant compte de la crise du Covid-19.

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LA CRISE SANITAIRE MET-ELLE FIN A L’ETAT DE DROIT ?

Le Parlement ivoirien détenteur du pouvoir législatif selon l’article 85 de la Constitution ivoirienne, est totalement bloqué depuis l’interdiction de tout rassemblement de plus de 50 personnes ; prescrite à la suite de la première réunion du Conseil National de Sécurité, relative à la lutte contre la maladie à coronavirus de Mars 2020.

Si les drames vécus par certaines nations du fait de cette maladie ont laissé notre instinct de survie prendre le dessus et nous retrancher tous dans un premier temps, les efforts conjugués du CNS et du Gouvernement après une vingtaine de jours, nous permettent de revenir à une saine appréciation de notre réalité pour trouver les meilleurs moyens de continuer de faire fonctionner correctement notre état de droit, notre démocratie malgré l’urgence.

Le dernier Conseil des Ministres qui s’est tenu ce Mercredi 8 Avril 2020 avec moins de vingt (20) Ministres sur un effectif de cinquante-cinq (55),a ouvert la possibilité d’un fonctionnement au prorata du Parlement, nécessaire pour donner une légitimité aux décisions relevant du domaine de la loi qui pourrait être prises par le Gouvernement pendant la gestion de la crise sanitaire.

Cette semaine, le Président de la République a pris une ordonnance pour modifier le code électoral. Nul doute que le problème de l’inexistence d’une loi d’habilitation appropriée en cette matière sera relevé quand viendra le temps de la ratification.

En effet aux termes de l’article 106 de la Constitution du 8 Novembre 2016 telle que modifiée par la loi 348 du 19 Mars 2020 portant Constitution de la République de Côte d’Ivoire, « Le Président de la République peut, pour l’exécution de son programme, demander au Parlement, par une loi, l’autorisation de prendre par ordonnance, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi »

Cette autorisation accordée par le Parlement à travers une loi au Président de la République pour légiférer en certaine matière est appelée loi d’habilitation. C’est une ouverture bien délimitée qui permet au pouvoir exécutif de s’immiscer dans le pouvoir législatif en certains cas.

Quand l’ordonnance modifiant le code électoral sera rendu publique, les ivoiriens verront qu’elle vise entre autre : la Constitution et la loi de finance portant Budget de l’état pour l’année 2020. Une recherche rapide dans la loi de finance portant budget de l’état pour l’année 2020, permettra de découvrir un article 23 intitulé législation par ordonnance ainsi libellé : « Le Président de la République est autorisé à prendre par ordonnance, pendant la gestion 2020, pour l’exécution de son programme en matière économique et financière, des mesures qui sont du domaine de la loi. Ces ordonnances doivent être soumises à la ratification du Parlement, au plus tard avant la fin de la session ordinaire de l’année 2020.»

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Tout citoyen qui veut s’attacher un jugement objectif posera une question toute simple : est-ce que le code électoral est une matière économique et/ou financière ?

S’il y répond par la négative alors lui-même conclura que l’ordonnance prise en matière politique, électorale pour modifier le code électoral n’a pas de fondement juridique approprié, pour utiliser un euphémisme.

C’est pour éviter de telles situations qu’il serait nécessaire de réfléchir à un fonctionnement de l’Assemblée nationale et du Sénat au prorata pour redonner une vie au pouvoir législatif qui est censé être en pleine session ordinaire de l’année 2020.

Le gouvernement ivoirien a d’ailleurs donné le ton avec un conseil des ministres en formation restreinte qui a permis de prendre des mesures. L’Assemblée nationale et le Sénat pourrait également constituer deux Assemblées fonctionnant en formation restreinte de quarante-neuf (49) Parlementaires pour chacune des chambres. Cette Assemblée pourrait être constituée sur la base de la représentation des différents Groupes Parlementaires et siéger à huit clos. Notons également que les commissions permanentes des deux chambres qui examinent les projets ou propositions de loi avant leur adoption en plénière sont composées de moins de cinquante (50) membres chacune.

Pour ce qui concerne les lieux de réunion, il convient également de souligner que l’Assemblée Nationale dispose d’un hémicycle qui accueille habituellement deux cent cinquante-cinq (255) Députés et le Sénat quant à lui siège dans une salle de deux milles (2000) places. Il est évident que 49 Parlementaires peuvent se réunir régulièrement dans chacune des chambres du Parlement sans enfreindre les mesures de sécurité sanitaires arrêtées.

Une telle proposition si elle est examinée, améliorée et admise, permettra à notre République de fonctionner normalement malgré la crise sanitaire et de se mettre à l’abri d’éventuelles contestations des décisions prises durant cette période.

Cela dit, lavons-nous régulièrement les mains, portons obligatoirement des masques en public pour nous protéger et prendre soin des populations de ce pays, notre seule patrie.

 

Honorable KONAN Koffi Marius

Député de la nation