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Côte d’Ivoire/Perspective des futures législatives: Abel Doualy parle à l’opposition ivoirienne

Réaménagement technique du gouvernement en lieu et place d‘une dissolution et de la formation d’une nouvelle équipe. Telle est la décision prise par le président Alassane Ouattara qui fait ainsi entorse aux pratiques courantes qui veulent qu’une nouvelle mandature démarre avec une nouvelle équipe gouvernementale. Quitte à y trouver quelques anciens maintenus selon des critères propres à celui qui nomme.

MAINTENIR LA COHESION ET L’UNITE D’ACTION

Qu’est-ce qui peut bien avoir milité en faveur d’une telle décision d’un simple réaménagement technique au moment où toutes les voix s’élèvent pour demander au chef de l’Etat d’œuvrer à plus d’ouverture en direction de l’opposition ? Sans être dans le secret des dieux, l’on pourrait avancer une raison principale. A savoir attendre la fin du dialogue inclusif avec l’opposition afin de voir la possibilité pour celle-ci de faire son entrée au gouvernement. Et en ce moment-là, le chef de l’Etat pourrait faire un remaniement en profondeur pour sortir des anciens ministres et les orienter vers de nouvelles fonctions. Notamment les postes électifs à venir ou des nominations à la tête des conseils d’administration.

Car Ouattara donnerait de lui une bien triste image de vouloir passer trois mandats (15 ans) avec les mêmes ministres, les mêmes directeurs généraux, les mêmes présidents de conseils d’administration là où l’on parle d’inclusion et de répartition équitable des fruits de la croissance. La gestion des hautes fonctions de l’Etat fait partie de cette bonne répartition à opérer. Et cela, conformément au sacro-saint principe de la mobilité dans l’administration. 

L’OPPOSITION DOIT MUTUALISER SES FORCES DANS LES LOCALITES POUR LA VICTOIRE AUX LEGISLATIVES

Dès lors, il fallait procéder à un léger réaménagement du gouvernement en attendant que les négociations aillent à leur terme. Et que les points de désaccord soient aplanis entre pouvoir et opposition. Toute chose qui favoriserait la cohabitation dans le cadre d’un gouvernement d’union. Tout cela pourrait intervenir après les futures législatives pour lesquelles les responsables du Rhdp invitent leurs militants à investir d’ores et déjà le terrain. En vue, disent-ils, d’assurer la victoire de leur parti et garantir ainsi une majorité parlementaire au président réélu pour un troisième mandat controversé afin de lui permettre de gouverner sans ennuis.

Voici l’esprit qui prévaut au sein du régime qui ne semble vouloir lésiner sur aucun moyen pour parvenir à ses fins. Ce qui est de bonne guerre. C’est pourquoi de son côté, l’opposition doit se donner les moyens nécessaires de montrer sur le terrain qu’elle est la vraie majorité sociologique en mutualisant les forces dans les différentes localités afin d’aboutir à la victoire aux législatives.

C’est vrai que les ambitions des cadres sont souvent un frein à cette dynamique de cohésion et d’unité d’action ; chacun voulant coûte que coûte tenter sa chance quand bien même il sait parfois qu’il ne peut gagner. Cela a toujours fait le lit de l’adversaire. Ce sont donc autant de choses et bien d’autres auxquelles il convient de travailler déjà en même temps que se poursuit, si possible, le dialogue avec le pouvoir.

UNE MAJORITE PARLEMENTAIRE EN FAVEUR DE L’OPPOSITION PEUT FAIRE BOUGER LES LIGNES

Un dialogue qui conditionne les futures échéances électorales que sont d’abord les législatives qui pourraient avoir lieu dans le premier trimestre de 2021. Et plus tard les régionales et municipales en 2023, les dernières ayant été organisées le 13 octobre 2018. Plutôt que de se focaliser sur la majorité à obtenir pour leur mentor, ce qui devrait importer pour les militants du Rhdp, c’est ce qu’il convient de faire pour ramener la paix entre les Ivoiriens. Et ce, après toutes les crises qu’a connues la Côte d’Ivoire du fait d’élections mal organisées avec des institutions électorales qui ne font nullement le consensus.

Le dernier cas en date est celui de la Commission électorale indépendante actuelle et du Conseil constitutionnel. Dont le président Koné Mamadou a transformé lundi la prestation de serment du président réélu en une tribune de cours de juridisme qui semblait ennuyer voire agacer certaines personnalités étrangères qui n’ont que faire des micmacs des Ivoiriens avec la loi. Ce cours était destiné à tous ceux qui doutent du sérieux du travail du Conseil constitutionnel quant au respect de la Loi qu’il est censé défendre. La réforme de ces deux institutions en charge des élections (Cei et Cc) reste une véritable pomme de discorde entre le pouvoir et l’opposition qu’il y a lieu de dissiper pour des échéances crédibles et paisibles à venir.

Car ce serait dommage pour le Rhdp de vouloir ruser à nouveau avec l’opposition en refusant les réformes nécessaires dans le secret espoir de la pousser à un autre boycott. Afin que la fameuse majorité parlementaire qu’il souhaite pour leur régime soit assurée sans aucun effort. Quant à l’opposition, elle doit tout mettre en œuvre pour aller aux législatives. Où elle a de réelles chances de glaner de nombreux sièges à l’Assemblée nationale si elle reste soudée. Et tous savent qu’une majorité parlementaire en faveur de l’opposition peut beaucoup peser dans la balance. Et faire bouger les lignes dans l’obtention des réformes souhaitées pour un Etat véritablement de droit. Et une grande démocratie citée en exemple de par le monde.

ABEL DOUALY

In le nouveau réveil / Jeudi 17 décembre – N°5641 // www.lereveil.net

Guikahue Ndri Narcisse Affi