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A quelques jours de l’émergence annoncée par Alassane Ouattara: Kong, son  »village natal », crie son amertunme et s’inquiète de son avenir

A quelques jours de l’émergence annoncée par Alassane Ouattara: Kong, son  »village natal », crie son amertunme et s’inquiète de son avenir

Autrefois grenier de la région du Tchologo, le département de Kong est aujourd’hui dans la tourmente, en proie à la misère et à la famine.

Jadis connu comme gros producteur d’ignames, de mil, de maïs, de sorgho et de manioc, le département de Kong est, depuis quelques années, dans l’impasse. Les vastes surfaces de production des vivriers qui faisaient la fierté du département ont disparu au profit des cultures pérennes, notamment l’anacardier. L’invasion par les Peulhs venus des pays voisins  avec des milliers de têtes de bœufs en est la principale cause et cela n’est pas sans conséquences.

Les nombreuses destructions des cultures des agriculteurs Lobi, principaux producteurs des vivriers qui inondaient les marchés de Bouaké, Dabakala, Ferké et bien au-delà, ont mis un terme aux différentes productions. Les conflits entre ces deux entités sont donc devenus monnaie courante dans le département de Kong, au grand désespoir des populations aujourd’hui en proie à la famine et à la pauvreté. « Ici, les conflits entre éleveurs peulhs et agriculteurs sont récurrents. Par an, si je n’ai rien résolu, c’est au minimum 80 cas de litiges liés à la destruction des cultures par les bœufs » explique le chef de village de Kong avec amertume.

Malgré l’existence des comités villageois, sous préfectoraux et préfectoraux, la cohabitation avec les Peulhs est vraiment difficile. «  Aucun éleveur n’est bouvier et les bouviers qui suivent les animaux sont très têtus et ils sont à l’origine des destructions massives des cultures » ajoute Ouattara Takiri, le chef qui déplore cette situation fâcheuse qui porte un véritable frein à l’économie locale. «  Les animaux n’ont pas de parc et ils dorment à la belle étoile. Tard la nuit, les animaux entrent dans les champs et bonjour les dégâts.

Une situation qui affecte la production des vivriers dans le département et notre économie locale. Ici, ce sont les Lobi qui sont les plus gros producteurs de vivriers. Ce sont nos parents qui sont allés chercher ces Lobi à Bouna parce que Kong s’étendait sur une vaste étendue et les terres étaient propices à l’agriculture. Aujourd’hui, à cause de ces conflits, beaucoup ont abandonné le travail de la terre » s’est indigné Ouattara Takiri.

« Avec l’arrivée massive des Peuls avec leurs cheptels et les nombreuses destructions des champs, bon nombre de Lobi n’arrivent plus à assurer leurs pitances  a fortiori produire en grande quantité »,  regrette le chef. Avant cette invasion des Peulh avec leurs bêtes, les commerçants venaient de partout s’approvisionner sur le marché de Kong selon les populations. Le mil, le sorgho, l’igname étaient produits en grande quantité pour être vendus sur les différents marchés de la région et bien au-delà. « Aujourd’hui, c’est le contraire et nous devons aller chercher ces denrées devenues rares chez nous, ailleurs à des coûts exorbitants ». 

Gagnés par le découragement, beaucoup d’agriculteurs ont rangé les dabas et  ont opté pour les cultures pérennes en l’occurrence la culture d’anacardier. Comble de malheur, les prix du kilogramme d’anacarde ont, eux aussi, chuté si ce n’est encore les bœufs qui avalent les noix de cajou qu’ils envahissent nuitamment avec la complicité passive des bouviers. «  Vous ne pouvez pas travailler toute la journée et pour finir, ce sont les animaux qui détruisent vos récoltes » s’est offusqué le descendant des Kéréou qui, cependant, fait tout son possible pour que règne la paix dans le département en lançant cet appel. « Je demande aux Peulh d’être sérieux.

Nous ne voulons chasser personne. Donc je leur demande de parquer les animaux dans des enclos appropriés. Il leur faut moderniser l’élevage vu le nombre croissant des éleveurs dans notre zone ». Kambou Ontité, Lébanin Hien et bien d’autres agriculteurs Lobi connus dans le département pour leur abnégation au travail de la terre pour une  production massive, ont tous abdiqué face aux dégâts des animaux et c’est à peine s’ils arrivent aujourd’hui à joindre les deux bouts.Les villages de Djangbanasso, Gbamin 1 et 2, Tériko  Flatassian qui comptaient parmi les  gros bourgs de production de vivriers et surtout d’ignames ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes en proie à la misère et à la famine.

En 2017, Lebanin Hien, l’un des agriculteurs  bien connus dans le département, s’est vu obligé de payer plus de 800000 francs d’amende pour avoir été accusé par un bouvier qu’il aurait menacé avec un fusil. « On a accusé le vieux à tort. Quand il arrivait  dans son champ d’ignames, les bœufs mangeaient ses ignames en présence du bouvier. Le vieux portait son arme en bandoulière à son arrivée au champ.

Quand il s’est mis à chasser les bœufs qui ravageaient sa culture en présence du bouvier qui ne  faisait rien contre la destruction causée par  ses bêtes, il s’en est suivi une vive dispute. A la fin, on apprend que le vieux aurait menacé le Peulh » s’est plaint un agriculteur, lui aussi victime des problèmes causés par les bœufs. Comme Kambou et Hien, les agriculteurs qui ont rangé leurs dabas sont légion. Cependant, les conflits entre agriculteurs Lobi et Peulh continuent de perturber la quiétude des populations de Kong au grand dam des autorités impuissantes. « Désormais, il a été décidé de faire payer les dégâts  causés par les bœufs en infligeant une amende à tous les propriétaires des bêtes des environs.

Car trop c’est trop et nous sommes fatigués des perpétuelles querelles entre les quelques braves agriculteurs qui nous restent et ces Peulh indélicats » a conclu le chef. Dans plusieurs villages Lobi, des affrontements à la machette ont été enregistrés entre éleveurs Peulh et agriculteurs Lobi. Le cas du village de Kongolo situé à 12 kilomètres de Kong est encore ancré dans les mémoires. En plus de vivre dans l’isolement et l’abandon, Kong, la belle cité traditionnelle ancestrale, vit dans la crainte des affrontements entre agriculteurs et bouviers. En attendant de trouver une solution idoine à la situation, on se regarde en chiens de faïence sous l’œil vigilant des comités de gestion des conflits entre Peulh et agriculteurs lobi.

Sarah Géneviève (Envoyée  spéciale  de lereveil.net à Kong)