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CIV/Jean-Baptiste PANY, spécialiste du Cacao s’interroge : Comment l’écosystème mondial du cacao envisage-t-il l’après « effet el niño » ?

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Les travaux de l’ICCO publiés récemment, le 30 août 2024,sont un support pertinent de réflexion.

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Pour commencer, les estimations de l’ICCO indiquent que la production mondiale de fèves de cacao accuse un recul d’environ 700 000 tonnes dû aux contreperformances observées en Côte d’Ivoire (baisse de -501 000 tonnes) et au Ghana (-204 000 tonnes). Ce repli n’a pas été compensé par les productions attendues des autres pays producteurs majeurs qui tendent à se maintenir, malgré l’effet el niño. Ainsi, au sens de l’ICCO, le monde attend à la fin de la saison 2023-2024 qui s’achèvera le 30 septembre 2024, une production totale de 4 332 000 tonnes contre 5 050 000 tonnes la saison précédente. La Côte d’Ivoire devrait réaliser selon la logique mentionnée, une performance de production de 1 740 000 tonnes (fin sept 2024) contre 2 241 000 tonnes précédemment (fin sept 2023) (-22%). De même le Ghana réalisera une performance de 450 000 tonnes (fin sept 2024) contre 654 000 tonnes (fin sept 2024) (-31%).

Concernant la demande mondiale de broyage de fèves de cacao, les estimations de l’ICCO révèlent une baisse moindre attendue du niveau de broyage d’environ -306 000 tonnes, malgré la forte baisse attendue de la production indiquée ci-dessus. Cette situation est expliquée par le recours aux stocks de sécurité constitués chaque fin de saison précédente (entre 35 et 40 % de la production mondiale). Ce choix a permis de compenser en partie la pénurie de fèves de cacao observée particulièrement au cours de la saison 2023-2024 en cours d’achèvement. Les stocks de fin de saison devraient dans cette logique baisser (de -24%) de leur niveau précédent de 35% (1 735 000 tonnes) à un niveau inférieur attendu de 27% (1 328 000 tonnes). À noter que, bien que divers facteurs semblent être mis en cause, la pénurie évoquée ci-dessus a été expliquée essentiellement par la pression des effets du changement climatique sur les récoltes en Afrique de l’Ouest et, dans une moindre mesure,par celle de la loi de l’UE concernant la déforestation. Cette dernière disposition n’a certes pas stoppé le commerce du cacao toxique produit dans les forêts classées, mais a contribué à exacerber le marché et à encourager la contrebande.

Lesindications de l’ICCO révèlent aussi que la baisse du niveau du broyage mondial de fèves de cacao a été faite au détriment du broyage aux origines (– 235 000 tonnes dont une baisse de 143 000 tonnes en Côte d’Ivoire et 70 000 tonnes au Ghana). La Côte d’Ivoire maintient toutefois son rang de 1er Broyeur mondial (650 000 tonnes traitées contre 793 000 tonnes précédemment).

Les principaux pays leaders du broyage maintiennent ainsi leurs rangs respectifs. Toutefois il faut noter que malgré les fortes pressions induites par la pénurie de fèves de cacao, les Pays-Bas (2ème) et l’Allemagne (3ème) maintiennent leurs rangs avec une faible baisse du niveau de broyage respectif de l’ordre de -1%, au contraire de la Côte d’Ivoire et du Ghana où le niveau de broyage a été réduit respectivement de -18 et -28%. Les autres broyeurs comme l’Indonésie (4ème mondial) ou les USA (6ème) maintiennent aussi leurs rangs avec des replis respectifs faibles de l’ordre de -5% et -3%. La Malaisie (5ème) est le seul broyeur significatif qui connait une progression (+2,5%). La situation observée du broyage révèle que le broyage aux origines, malgré des capacités de broyage supérieures et des coûts plus faibles, a été détourné au profit du broyage dans l’UE, aggravant la pression sur la déforestation (niveau de freinte élevé) paradoxalement à l’origine des dernières lois restrictives de l’UE (?).

Enfin, plusieurs préoccupations tendent à émerger de l’analyse et des observations réalisées :

  • Comment l’écosystème du cacao envisage-t-il une hause éventuelle logique de la production mondiale de cacao (tirée par des prix bord-champ plutôt attrayants) et éventuellement par El niña, lasaison à venir et/ou celles d’après ? Ne court-on pas les mêmes risques que ceux de l’expérience de la saison 2016-2017 ?
  • Comment les pays leaders de la production de fèves de cacao attendent-ils défendre ou encourager le broyage domestique de leurs propres récoltes, si la pénurie persiste, celui-ci étantillogiquement défavorisé au profit de capacités de broyage installéesnotamment en Occident ?
  • Comment les pays leaders de la production de fèves de cacaocomptent-ils rattraper le gap de production induit par les effets évoqués plus haut ?

En tout état de cause, l’évolution de la situation du marché mondial du cacao tend à confirmer la thèse que nous avons défendue dans le livre intitulé « Cacao, Chocolat et Pauvreté » paru aux Éditions Universitaires Européennes en février 2021 : Le modèle économique mondial actuel du cacao, vieux de six (6) siècles, est essoufflé, mais les pays leaders de la production de fèves de cacao, comme la Côte d’Ivoire et le Ghana, tardent à s’en apercevoir. Ceci malgré diverses opportunités qui pourraient soutenir une vision nouvelle de changement de paradigme.

Télécharger l’intégralité de la contribution de JB PANY ici


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