Opinion : «Le crépuscule des idoles» ? Restituez-nous la Côte d’Ivoire de partage!

Les lampions se sont éteints à Yamoussoukro, lieu de la remise du Prix Félix Houphouët-Boigny/UNESCO pour la recherche de la Paix, au soir du 8 février 2023. À en croire le succès médiatique de cette cérémonie en Côte d’Ivoire et dans la diaspora ivoirienne, Yamoussoukro serait devenue pour l’occasion, la capitale mondiale de la paix !
En effet, en ce lieu béni où la Fondation Houphouët-Boigny pour la Paix où s’est déroulé l’évènement et la Basilique Notre Dame de la Paix partagent ce même espace de Yamoussoukro, nombreux sont ceux qui se sont souvenus du bon vieux temps, de la période glorieuse du président Félix Houphouët-Boigny, le sage de l’Afrique, dont tous se réclament aujourd’hui.
En ce temps-là, sans être le paradis sur terre, la Côte d’Ivoire était une chaleureuse terre d’accueil des frères et sœurs de la sous-région, de toute l’Afrique et même de ceux des pays plus éloignés tels que le Liban et la Syrie, sans compromettre les intérêts fondamentaux des Ivoiriens.
Les Ivoiriens étaient fiers d’appartenir à ce pays unique, havre de paix où il faisait bon vivre. Le simple fait de donner sa provenance « Côte d’Ivoire » ouvrait toutes les portes dans le monde entier. Bref, ce sentiment nostalgique des temps de paix, de dialogue et de fraternité sincère en Côte d’Ivoire, que savourent douloureusement aujourd’hui tous les Ivoiriens/iennes et habitants de la Côte d’Ivoire, se lisait sur tous les visages des personnes présentes dans la salle où se tenait la remise du prix FHB/UNESCO pour la recherche de la paix, ce mercredi 8 février 2023.
C’est probablement ce qui a arraché des pas de danse en toute dignité de chef, au président Bédié, successeur constitutionnel du Président Houphouët-Boigny, qui, malgré sa volonté et ses efforts de poursuivre l’ère Houphouët-Boigny, a succombé à la mise à mort du « Miracle ivoirien » par le coup d’État de 1999 qui a signalé l’effondrement institutionnel de la Côte d’Ivoire.
Au moment où les effets de « la fête de la Paix à Yamoussoukro » se sont atténués ou sont en train de s’atténuer, et que nous nous approchons fatalement de l’année 2025, à baptiser « année de la dernière chance pour sauver la Côte d’Ivoire », nous voudrions nous abreuver de l’œuvre du philosophe allemand Friedrich Nietzsche, puisque de surcroît la personnalité à l’honneur est la Chancelière allemande, Angela Merkel, en guise de source d’inspiration. Car en effet, l’œuvre de ce philosophe est mieux appropriée pour rendre compte des moments historiques que nous traversons en Côte d’Ivoire : Le Crépuscule des Idoles.
La première question qui se dégage de la parade médiatique des festivités de Yamoussoukro est de savoir comment se fait-il que le prestigieux prix de la recherche de la paix porte le nom de notre premier président Félix Houphouët-Boigny, et que nous Ivoiriens et Ivoiriennes, nous cherchons encore nos repères de dialogue, de paix et de réconciliation ? Pourquoi ceux qui se réclament être héritiers politiques des idéaux de paix sont fossoyeurs et broyeurs de paix en Côte d’Ivoire et érigent la corruption flagrante par intimidation, l’injustice, et la violence en instrument d’accès et d’exercice du pouvoir?
Pourquoi sont-ils dogmatiquement hermétiques à l’idée de dialogue et de réconciliation des populations ivoiriennes qui n’aspirent qu’à la paix et à la réconciliation, car ce sont elles les premières et dernières victimes des turpitudes des acteurs politiques ?
Mais au-delà de ceux qui se réclament Houphouetistes, la prétention des idoles politiques au droit à l’adoration de notre part malgré leur palmarès évident d’anti-Houphouétisme, n’est pas l’unique explication de l’anachronisme sémantique de la cérémonie de « remise du Prix de la Paix Félix Houphouët-Boigny » à Yamoussoukro. (…)
En effet, comment comprendre qu’en plein vingt-et-unième, et avec tout ce que nos populations ont subi et subissent en Côte d’Ivoire depuis le coup d’État fatal de 1999, en passant par « les temps Guéi, la rébellion de 2002, la grande crise post-électorale de 2010, 2020 et son lot de violences, qu’aucun leader ivoirien, aucun parti politique ivoirien, aucun groupe de la « société civile », aucun leader religieux, gardien de Temples Divins, aucun groupe « de sages des chefferies traditionnelles », aucun intellectuel ou artiste ivoirien ou africain crédible, pour ne pas parler des institutions africaines régionales et continentales ni de la fameuse « communauté internationale », ne soit encore venu sur le « zegrepa « la place publique ivoirienne, africaine et internationale pour dire simplement, gentiment mais fermement à toute la classe politique ivoirienne : Au nom de la Paix et pour les pauvres populations qui partagent cette partie de la Terre des Hommes/Femmes, et aussi au nom du bon sens : Aucune goutte de sang supplémentaire ne mérite d’être versée en Côte d’Ivoire en votre nom ou à cause de Vous ». Ce fut une Côte d’Ivoire de valeurs humaines qui a attiré ceux qui, ayant bénéficié de la générosité et de l’hospitalité, ont cru bon de s’y installer…
Pourquoi ce paradoxe moqueur, ironique ?
C’est vrai que le coq a déjà chanté, et que « le monde entier » surtout « la communauté internationale » a déjà entendu et jouit de la mélodieuse harmonie de ce chant de coq annonciateur de la « pacification de la Côte d’Ivoire » et d’une énième aube africaine héritière de « la mission civilisatrice » française. Mais certains d’entre nous, solitaires ermites du désert certes, et la grande majorité du peuple ivoirien et africain, refusent d’être les dupes risibles d’un fatal aveuglément.
Qu’on nous épargne les prochaines cérémonies de remise « de Prix Félix Houphouët-Boigny/UNESCO de la recherche de la paix » sans engagement pour les idéaux humanistes et réduisant cette noble vision désormais à une cynique phraséologie… Qu’on nous restitue la Côte d’Ivoire, pays de partage, sans exclure ceux/celles qui l’ont défendu et bâti depuis l’époque coloniale.
Par A.N
In Le Nouveau Réveil du mercredi 22 février 2023
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