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Dougroupalégnoa (Gagnoa)/Le général Apalo Touré entre conseils et menaces : «Je ne suis pas venu pour demander pardon, je vous mets en garde»

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L’actualité de la semaine dernière en Côte d’Ivoire a été dominée par les affrontements interethniques à Dougroupalégnoa, sous-préfecture de Gagnoa, dans la région du Gôh, où il y a eu mort d’homme et plusieurs maisons incendiées. Les événements se sont déroulés les lundi 23, mercredi 25 et jeudi 26 octobre 2023. Vu la gravité de la situation et bien qu’une accalmie ait été obtenue avec les interventions des chefs traditionnels et le député Maurice Kakou Guikahué, le chef de l’Etat a dépêché le général de Corps d’Armée, Commandant supérieur de la Gendarmerie nationale, Alexandre Apalo Touré à Dougroupalépgnoa dans le canton Paccolo. Le général Apalo Touré a été entre conseils et menaces en présence du député de la circonscription l’honorable Maurice Kakpu Guikahué. Message aussi clair, limpide et accessible à tous. Morceaux chois de l’Adresse de l’émissaire de la République. Annoncé pour 16h, le Général Touré est arrivé à 18h03 et s’est adressé aux populations qui ont attendu tout ce temps, après que le chef canton Noël Gnagno ait planté le décor de la rencontre. C’était le mardi 31 octobre 2023, sous le préau de Dougroupalégnoa.

«Sur instruction du président de la République, le ministre de la défense m’a demandé de venir ici pour parler à nos parents. C’est pour cette raison que je suis là. Je voudrais dire merci à tout le mon d’être présent. Merci à tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, ont contribué à apaiser la situation de paix relative. Je veux en particulier dire merci au grand frère, le ministre Guikahué. Je lui dis encore merci parce qu’il était aussi à Katiola pour les obsèques du général Ouassénan et après Katiola, il est venu immédiatement ici pour vous parler et parler de paix et de cohésion entre les populations. Surtout quand il a appris que je venais ici, il a attend pour m’accueillir et participer à cette rencontre et m’aider à trouver des solutions. Merci grand frère.

Les questions de sécurité, c’est un peu comme la folie. Quand quelqu’un devient fou, on l’envoie à l’hôpital, on le soigne, il guéri ou du moins on dit qu’il est guéri. Il faut tout faire pour ne pas qu’il rechute, parce que quand il rechute, l’expérience montre qu’il devient difficile à guérir. Donc les questions sécuritaires sont comme ça. Quand un problème de sécurité arrive et qu’il y a un désordre, surtout qu’il y a mort d’homme, il faut s’attacher à le résoudre bien et rapidement. Parce que si ce n’est pas bien résolu que ça revient, les conséquences deviennent plus graves. C’est pour cette raison que je souhaite qu’on m’écoute très bien.

On a l’habitude de soigner les conséquences, et pourtant, tant que la cause n’est pas résolue, le problème revient toujours. Les causes de ces palabres communautaires sont nombreuses. Mais comme on sait aujourd’hui, il y a la précocité chez les enfants. Les enfants d’aujourd’hui, quand ils ont 10 ans, ce sont des gens qui ont l’âge sociologique des hommes d’avant qui avaient  25 ans, parce que, à 10 ans déjà, ils voient tout, ils ont internet, ils voient toutes les vilaines choses qui sont dans internet, ils savent ce que les hommes de 25 ans avant savaient ou faisaient et ils font les mêmes choses. (…) Malheureusement quand tu n’as pas l’âge de faire quelque chose et que tu t’évertues à le faire, tu ne peux as le faire aussi bien que si tu t’étais laisser murir correctement. Dieu nous montre à travers sa création ou ses créations ou encore ses créatures, nous montre comment la vie sociale doit se faire (…). Avec cette précocité, les enfants d’aujourd’hui deviennent de mauvais enfants et c’est la majorité malgré les efforts des parents. La plupart des enfants sont aujourd’hui mauvais. Ils sont éduqués par internet, ils sont éduqués par la rue quelque soit ce qu’on leur dit, quelque soit ce qu’on leur dit à l’école, quelque soit ce que les parents leurs disent à la maison, ils font autre chose. Ils ferment les oreilles. Ils ferment pratiquement même les yeux et même leurs cerveaux. Ils s’intéressent  plutôt à Internet.

Donc les jeunes, je vous demande de murir, d’écouter vous parents et je sais de quoi je parle. Il faut écouter. Si vous n’écoutez pas, vous allez refaire les mêmes choses et en faisant les mêmes choses vous aurez les mêmes conséquences.

La drogue que vous fumez-là, son autre nom c’est la mort. Si elle ne vous tue pas à travers une maladie qu’elle vous donne, si elle ne détruit pas vos poumons, elle fait de sorte que vous posez des actes dangereux, vous vous retrouvez dans des positions dangereuses et on finit par vous tuer là-bas. Donc il faut faire attention à la violence. La seule chose qui garantisse une réussite, c’est la paix.

C’est parce que vous êtes importants que le président m’a demandé de venir vous parler. Vous êtes importants pour vos communautés ici, mais vous êtes importants aussi pour le pays.

Je ne suis pas juge, mais je suis venu vous dire que pour ceux qui ont commis des crimes, ils vont être recherchés et arrêtés. Ceux qui vont être arrêtés, ils vont être jugés. Ceux qui ont l’intention de continuer à tuer leurs frères, ceux qui ont l’intention de continuer cette violence, si vous n’écoutez pas les conseils qui vous sont donnés et que vous posez des actes ou que vous tuez d’autres personnes ou que vous blessez d’autres personnes ou que vous encouragez la violence, vous allez être arrêtés, vous allez être mis en prison.

C’est pour cette raison que je lance un appel aux parents, dès que ça arrive, ce sont des coups de fil aux magistrats, aux autorités, à de hautes autorités pour fatiguer tout le monde pour dire que mon enfant est en prison. Mais ton enfant a fait quoi pour être en prison ? Donc il ne faut pas espérer qu’on va encourager le désordre dans la région ici, emmener les gens à s’entretuer et puis espérer que parce que je connais telle ou telle autorité soi-même on va s’en sortir. Si vous avez directement commis l’acte, vous allez aller en prison. Si vous avez encouragé l’acte, ça s’appelle la complicité, vous allez aller en prison. Si vous êtes coauteur, vous n’avez pas posé l’acte vous-même, mais vous étiez sur le terrain dans cette situation de violence et que votre camarade a fait, c’est que vous êtes coauteur. Vous êtes partis ensemble pour commettre cet acte, vous allez aussi aller en prison. Donc je vous demande de comprendre que la loi n’est pas faite pour certaines personnes  et pas pour d’autres. Elle est faite pour tout le monde. Ne pensez pas que vous allez commettre des actes et on ne va pas le savoir, on va le savoir à tout prix et puis on va vous arrêter et on va vous mettre en prison. Personne n’a le droit de tuer son camarade. Vous avez des autorités, des chefs, l’administration, c’est quelle affaire on ne peut pas régler entre nous hommes et qu’il faille utiliser des machettes ou d’autres armes pour arracher la vie des gens ?

Donc je vous mets en garde, je ne suis pas venu pour vous demander pardon. Pour la sécurité, nous-là, on demande pas pardon à quelqu’un pour qu’il ne tue pas les gens. Tu tues les gens, tu es un assassin, tu es dangereux pour le pays et on doit te traiter comme tel. Je répète, celui qui essaie de tuer ou qui tue les gens va être arrêté, mis en prison pour tentative ou pour son acte s’il a tué effectivement ou s’il a blessé. Donc ce n’est pas pour vous demander pardon. Les forces de l’ordre sont venues ici là pour vous regarder, pour vous sécuriser parce que dans toutes les sociétés, les palabres arrivent. A la maison papa et maman, les palabres arrivent. Frères et sœurs, des palabres arrivent. Enfant même et son papa, les palabres arrivent. Dieu a créé nos sociétés comme ça.

Mais quand tu es en train de faire palabres et qu’on vient te séparer, on vient vous séparer et on vous dit qu’il faut arrêter comme ça, si tu es un être humain, tu dois comprendre et puis arrêter.

Vous devez tout faire pour qu’il y ait la paix, la cohésion entre vous. Quelle que soit la raison rien ne peut justifier la violence, que ce soit la politique, que ce soit la religion, les questions ethniques ou autre, quelle que soit la raison aucune ne doit vous amener à la violence.

Quand on n’est pas content, il y a le chemin de la justice, quelque soit ce qui vous gêne, vous portez plainte. Vous avez la plainte qui peut être portée de façon traditionnelle, vous avez la plainte qui peut être posée chez l’autorité administrative, vous avez la plainte qui peut être posée chez l’autorité policière (Police et gendarmerie) et puis les choses vont se régler. C’est comme ça fonctionnent les sociétés civilisées. Et nous n’allons pas dire que nous ne sommes pas une société civilisée. Il faut faire des efforts les jeunes. Ceux qui ne veulent pas comprendre et feront des bêtises, nous les attendons. Si vous voulez avoir la paix ici, il faut avoir un comportement de paix. Je répète, je ne suis pas venu vous demander pardon pour faire la paix. Je suis venu vous dire que vous avez l’obligation de faire la paix. »

Propos retranscrits par Gilles Richard OMAEL à Dougroupalégnoa (S/P de Gagnoa)