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Mise en place du parti unifié Rhdp: Me Emile Suy Bi (Avocat Pdci) dévoile les conséquences sur les partis membres… «C’est en toute illégalité»

Mise en place du parti unifié Rhdp: Me Emile Suy Bi (Avocat Pdci) dévoile les conséquences sur les partis membres… «C’est en toute illégalité»

LE PARTI UNIFIE RHDP : SA CREATION ET LES CONSEQUENCES DE SA MISE EN PLACE SUR L’EXISTENCE DES PARTIS POLITIQUES MEMBRES DU GROUPEMENT POLITIQUE RHDP

En côte d’Ivoire, la question de la création du parti unifié et des conséquences qui en résulteraient pour les partis politiques encore membres de cette formation politique continue d’alimenter le débat politique.

Dans ce débat, il se pose principalement, essentiellement, la question de savoir si des partis politiques peuvent créer un autre parti politique et si les partis politiques membres du Groupement politique RHDP continueraient d’exister malgré la mise en place du parti unifié RHDP.

I. Les faits et la problématique

Le 30 novembre 2018, le communiqué annonçant le Congrès constitutif du parti politique RHDP a été rendu public. Dans ce texte, il est notamment indiqué que : « enfin, le Président du RHDP, SEM Alassane OUATTARA, a rappelé que peuvent adhérer au RHDP toute personne, toute association, tout parti, mouvement ou groupement politique se reconnaissant dans les idéaux de paix, de stabilité pour la Côte d’Ivoire et de rassemblement des Ivoiriennes et des Ivoiriens. »

Au cours d’une conférence de presse du comité d’organisation du congrès constitutif du RHDP, Monsieur BICTOGO Adama, le Président dudit comité, a affirmé que « le 26 (janvier 2019), chacun devra se déterminer. Il est impossible d’appartenir au RHDP et à d’autres partis politiques. Même en France, on ne peut être membre du parti socialiste et en même temps de l’UMP. »

A l’issue d’une réunion de son Bureau politique tenue le 22 décembre 2018, l’UDPCI a publié un communiqué indiquant que « le Bureau politique autorise le Parti à prendre part aux travaux du Congrès Constitutif du RHDP du 26 janvier 2019. » Répondant à une question d’un journaliste après ce Bureau Politique, le Président de l’UDPCI, interrogé sur la dissolution annoncée des partis membres du RHDP, a répondu ainsi qu’il suit : « à ce que je sache, le Congrès constitutif du RHDP n’a pas à son ordre du jour la dissolution des partis membres du RHDP. »

Le 22 décembre 2018, en réaction à cette déclaration du Président de l’UDPCI, Monsieur Adama BICTOGO a affirmé que : « pour nous, on ne peut faire cette offre politique en tant que RHDP et appartenir à un autre parti politique. »

Le lendemain, c’est-à-dire le 23 décembre 2018, le Vice-président de la République et du PDCI-RDA, Monsieur Daniel KABLAN DUNCAN, au cours d’une cérémonie à l’Hôtel Sofitel Ivoire, a lancé l’appel suivant : « à vous militantes et militants du PDCI-RDA qui ne souhaitez pas la disparition du PDCI-RDA, mais qui pensez que le PDCI-RDA devrait faire des alliances avec tous les partis politiques et avec tous ceux qui partagent clairement l’houphouëtisme … nous voulons lancer un appel solennel à nous rejoindre. »

Dans ces déclarations, transparaissent les questions que soulève le processus de mise en place du parti unifié :

  • Toute association, tout parti, mouvement ou groupement politique pourrait-il adhérer au parti politique RHDP ?
  • La création du parti politique RHDP entrainera-t-elle la dissolution des partis membres du groupement politique RHDP ?

La réponse à ces questions se trouve dans les dispositions légales applicables aux partis et groupements politiques.

II. Les dispositions de la loi n° 93-668 du 9 août 1993 relative aux Partis et Groupements politiques

Aux termes de l’article 1er de cette loi, « le Parti politique est une association de personnes physiques qui adhèrent aux mêmes idéaux politiques, s’engagent à les faire triompher par la mise en œuvre d’un programme, en vue de conquérir et d’exercer le pouvoir selon les principes démocratiques définis dans la constitution.

Le Groupement politique est :

  • Soit une association de partis politiques qui partagent les mêmes idéaux et adoptent les mêmes méthodes pour la mise en œuvre de leur programme ;
  • Soit une association de personnes physiques ayant pour objet de concourir à la réalisation du programme d’un Parti politique.

De cette disposition légale, il ressort que :

  1. Un parti politique se forme entre des personnes physiques qui le créent ou y adhèrent par la suite. Seules des individus peuvent créer un Parti politique et en être membres.

L’appel lancé à toute association, tout parti, mouvement ou groupement politique d’adhérer au parti politique RHDP est donc illégal en ce que ces entités ne sont pas légalement habilités à créer ou à adhérer à un parti politique. En effet, ces personnes morales, qui, pour cela, ne sont pas des personnes physiques, ne peuvent pas créer un parti politique ou en devenir membres.

Est tout aussi illégale l’autorisation que le Bureau Politique de l’UDPCI a cru pouvoir donner à ce parti pour prendre part aux travaux du Congrès Constitutif du RHDP du 26 janvier 2019.

  1. Lorsque plusieurs partis politiques partagent les mêmes idéaux décident de fédérer leurs moyens et forces, ils forment un groupement politique. Ils ne peuvent pas créer, entre eux, un autre parti politique.

III. La création du parti politique RHDP et la dissolution des partis politiques membres du groupement politique RHDP

Pour certains acteurs politiques, la création du parti politique RHDP entrainerait la dissolution des partis membres du groupement politique RHDP. Pour d’autres, tel ne sera pas le cas, la dissolution des partis n’étant pas inscrit à l’ordre du jour du congrès du 26 janvier 2019. A ce sujet, il faut retenir que :

  1. La dissolution des partis n’est pas inscrit à l’ordre du jour du congrès du 26 janvier 2019 parce qu’un parti politique ne peut pas en dissoudre un autre. Seuls les organes compétents de ces partis (en général, le Congrès) sont compétents pour prendre cette décision.

Ainsi, malgré la création du parti politique RHDP, les partis politiques membres du groupement politique RHDP continueront d’exister tant que les décisions de leur dissolution n’auront pas été prises au cours de leurs congrès respectifs.

  1. Toutefois, tous les militants de ces partis politiques qui décideront d’adhérer au parti politique RHDP perdront, automatiquement, par ce seul acte, leur qualité de militant de leur parti actuel.

Il s’ensuivra que ceux de ces militants qui exercent une responsabilité au sein de leur parti en seront déchus. En effet, un militant d’un parti politique ne peut pas être le Président, le Secrétaire Général, le membre du Bureau politique, le Secrétaire de Section, etc. d’un autre parti politique.

Ainsi, s’ils ne sont pas dissous par leurs propres congrès avant le 26 janvier 2019, les partis politiques membres du groupement politique RHDP seront confrontés à de nombreux cas de vacances de postes de responsabilités dont les titulaires seront devenus militants du RHDP.

CONCLUSION

  1. C’est en toute illégalité que des partis politiques prétendent pouvoir créer, entre eux, un nouveau parti politique.
  2. La création de ce nouveau parti politique aurait dû être précédée de la dissolution des partis existants. Ce sont alors les anciens militants des partis dissous qui auraient créé le nouveau parti.
  3. Conscient de cette vérité légale, le PDCI-RDA a choisi de dire non au parti unifié parce qu’il n’entend pas disparaître.

Fait à Abidjan le 26 janvier 2018
Me SUY BI Gohoré Emile
Secrétaire Exécutif chargé des Affaires juridiques du PDCI-RDA